jeudi 1 décembre 2011

Leçon n° 12 Aspects phonétiques et phonologiques


Extraits du livre de Jean Adolphe Rondal "Langage et communication chez les handicapés mentaux".
La parole, ou l'émission de sons et des combinaisons de sons qui servent à construire le langage, n'est pas un phénomène unitaire. Elle comporte plusieurs niveaux mettant en action des structures anatomiques et des mécanismes physiologiques distincts: la soufflerie vocale, la phonation et l'articulation.
La soufflerie vocale
est l'étage situé au dessus du larynx. Pour parler il faut de l'air en provenance des poumons. Cet air est expulsé par l'effet de contractions musculaires abdominales (diaphragme) et costales (muscles intercostaux).
La phonation
est la composante de la parole située au niveau du larynx, le générateur des vibrations sonores. Le larynx comporte un ensemble de membranes, muscles et cartilages indispensables à son fonctionnement. Il est relié au système nerveux périphérique et central. L'articulation fait intervenir les cavités de résonance supra-laryngées que sont le pharynx, le nez, la bouche et les lèvres. Les modifications de volume et de forme de ces cavités permettent de faire varier les propriétés sonores des émissions verbales et d'accroître ainsi le registre expressif. La mise en action de ces niveaux de la parole obéit à une hiérarchisation physiologique : l'articulation implique l'intégrité de la phonation et de la soufflerie vocale, tandis que la phonation implique la participation de la soufflerie vocale. Le rythme de la parole est également une dimension importante à prendre en considération. L'articulation des sons et groupes de sons - la co-articulation - doit se distribuer à l'intérieur des limites temporelles acceptables pour l'auditeur. Toute atteinte d'une des composantes mentionnées ci-dessus détermine une ou plusieurs anomalies de la parole. (...) A cela, il convient d'ajouter les troubles de l'audition bien qu'il soit quelque fois difficile de mesurer l'incidence des déficits auditifs sur la parole.
On voit ainsi se profiler des zones d'action pour le formateur qui après avoir repéré certains dysfonctionnements et les avoir évalués pourra mettre en œuvre une série d'exercices destinés à les corriger en totalité ou en partie. Certains concernant la soufflerie vocale et l'articulation sont assez connus et faciles à mettre en œuvre, ceux destinés à résoudre les problèmes de phonation sont moins connus et nécessitent parfois l'apport de spécialistes. On peut déjà citer les plus simples qui consistent à travailler sur les voyelles orales et nasales (a/an; i/in;o/on, etc.)
Voici quelques exercices empruntés à l'orthophoniste Christine Pointon.

Pour travailler l'initiation de la voix
Afin de faciliter l'initiation de la voix et de réduire la rudesse et l'explosion de l'attaque, on
demande au patient d'expirer par la bouche puis de débuter la phonation du /a/. L'exercice
doit être répété plusieurs fois en réduisant progressivement la longueur de l'expiration et en
augmentant la longueur du /a/ vocalisé. On varie l'exercice en changeant la voyelle.
1 . /........a:......./
2. /......a:......./
3. /....a:......./
4. /..a:......./
5. /a:......./

· Quand le patient a réussi l'exercice précédent, on encourage la même démarche avec différentes constrictives sourdes précédant les voyelles.
1- /s.....a: ;s......i: ;s......u:/
2- /f.....a: ;f......i: ;f......u:/
3- /ch.....a: ;ch......i: ;ch......u:/

Pour le contrôle de la projection et du volume
· bourdonnements : le patient doit produire un /mm ... /, les lèvres fermées (et non serrées)
étant en contact étroit avec la cavité buccale aussi large que possible (les dents ne doivent
pas être serrées).
· Quand le bourdonnement est réussi : on demande au patient d'ajouter une voyelle
vocalisée au bourdonnement.
1. /m...a:.../ ; /m...e:..../ , /m....o :.../;/ m....i:... / ; /m....u:..../
Progressivement, le patient doit réduire la longueur du /m/ et augmenter celle de la
voyelle.
2. /ma:...ma:...ma:.../
/mi:...mi:...mi:.../
3. /ma:...mo:...me:.../
/mi:...mu:...mo:.../
· Contrôle du volume : à partir d'une voyelle tenue, le patient doit suivre les instructions du
thérapeute afin de l'émettre de plus en plus, ou de moins en moins fort.
1. /a:....../
(faible - fort)
2. /a:....../
(fort - faible)
3. /a:....../
(faible - fort - faible)

· Etendre l'étendue en hauteur : il faut encourager le patient à chanter la gamme en montant
et en descendant. Pour cela, il peut utiliser une voyelle ou une combinaison
consonne/voyelle. L'objectif est d'obtenir au moins trois hauteurs différentes :
bas / moyen / haut.
· Les glissements : quand l'étendue en hauteur du patient est établie, on peut utiliser des
exercices de glissements qui couvrent toute cette étendue. Ces exercices annoncent le
travail d'inflexion et de la prosodie. En utilisant une voyelle, on demande au patient de
monter ou de descendre de la façon suivante :
- Glisser de bas en haut
- Glisser de haut en bas
- Glisser du médium vers le haut
- Glisser du médium vers le bas
- Glisser du bas vers le médium
- Glisser du haut vers le médium
- Glisser du haut vers le médium puis vers le haut
- Glisser du médium vers le haut puis vers le médium
- Glisser du bas vers le haut puis vers le médium

Pour lutter contre l'assourdissement des consonnes sonores
On propose au patient de prononcer la consonne en position inter-vocalique et de faire
allonger les voyelles qui l'entourent.
/a :....ba :..../
/a :....da :..../
/a :....ga :..../

2.3 Travail du voile
« L'hypernasalité est définie comme la perception excessive de la résonance au niveau
de la cavité nasale lors de la phonation des voyelles. »

Des exercices mettant l'accent sur une plus grande ouverture de la mâchoire et sur des
mouvements plus importants de la langue et des lèvres peuvent atténuer ces
dysfonctionnements.
Le principal mouvement recherché est l'élévation du voile, pour cela on peut :
· Encourager le patient à bailler ; ce qui facilite l'élévation du voile.
· Faire répéter une série de consonnes nasales, d'occlusives sonores et de voyelles :
Exemple: /mba: mba: mba:/
/nda: nda: nda:/
/nga: nga: nga:/
· Gonfler les joues : le patient doit inspirer profondément puis tenir ses lèvres jointes et
gonfler les joues en maintenant cette position quelques secondes avant de relâcher la
respiration ( pincer les narines si cela peut l'aider à éviter une émission nasale).
· Pour faciliter la coordination des mouvements palato-pharyngés nécessaires pendant la
parole, il est important de conserver la progression suivante dans l'utilisation des phonèmes :
1 - Réaliser des consonnes explosives orales sonores, labiales, alvéolaires puis
vélaires, suivies par une voyelle.
Exemple : /ba da, ga/
2- Réaliser des fricatives orales suivies par une voyelle
Exemple :/fa, sa, a/
3- Réaliser des alternances de consonnes orales et nasales dans des logatomes
puis des mots monosyllabiques.
Exemple : /ba, ma ; ma, ba/
mé, pa ; moi, bon
mon, pon ; mon, bon
non, son ; moi, soi
4- Réaliser des groupes contenant des sons oraux et nasaux dans des syllabes
ou des mots.
Exemple : / sma, smi smo/
snack, snob
asthme, isthme