mardi 5 octobre 2010

Leçon N°8: Les gestes peuvent nous enrichir

"Création d'Adam" de Michel-Ange dans la Chapelle Sixtine

Jacques Cosnier, professeur émérite de l'Université Louis-Lumière-Lyon II et chercheur au Laboratoire ICAR, s'intéresse depuis longue date à la communication non verbale. S'il est avéré que la communication non verbale fait partie intégrante du système d'intéraction qui s'instaure entre des individus qui dialoguent, ce chercheur va plus loin et montre le rôle essentiel et particulier des regards, mimiques, expressions faciales, gestes et postures corporelles dans l'accompagnement des paroles.
Pour vous familiariser avec ses propos vous pouvez reprendre à votre compte quelques exercices effectués par Jacques Cosnier et son équipe.
Ainsi vous demanderez à un participant de raconter une histoire à une autre personne située face à lui comme dans une conversation classique, mais le conteur ne pourra se servir que de ses organes phonatoires et devra s'interdire tout mouvement, mimique. Cet exercice est impossible à mener avec la quasi-totalité des individus.
Vous pouvez demander également à un autre participant de rester debout sans bouger tout en n'exprimant aucun affect, puis au bout d'un certain temps de parler de choses sans importance. L'auditoire remarquera aussitôt la mise en mouvement des mains, du corps tout entier et si l'on contrarie ces mouvements on constatera aussitôt un appauvrissement du langage voire une confusion verbale.
La "multicanalité" signifie que les énoncés sont un mélange à proportions variables de verbal et de non verbal (à la fois vocal et mimogestuel). L'intérêt des travaux de Cosnier réside dans sa volonté de définir le statut de la communication non verbale.
Il distingue donc l'activité mimo-gestuelle qui est liée à la constitution de l'énoncé auquel elle s'intègre, à savoir la gestualité déictique ou désignante (c'est celui-ci qui me plaît le plus n'a de sens qu'avec le geste qui l'accompagne).
S'ajoute une gestualité illustrative qui mime l'action, ou figure dans l'espace certaines caractéristiques de l'objet référent. Ces gestes se retrouvent le plus souvent dans des descriptions de lieux. Comment décrire un escalier en colimaçon sans le geste de la main qui s'enroule? Ces gestes montrent à quel point le corps sert de repères spatio-temporels à l'organisation de la pensée et de matrice à la formation du discours. Exemple: le geste autocentré qui accompagne la phrase C'est mon opinion. Souvent les gestes ont double fonction, ils illustrent la pensée ET ils facilitent son énonciation.
Pour en savoir plus voici deux liens :
http://icar.univ-lyon2.fr/membres/jcosnier/publications.htm
http://icar.univ-lyon2.fr/membres/jcosnier/articles/Gestes_du_dialogue_89.mov.MOV

Comme pour les mots, la richesse des gestes varie d'une personne à l'autre. Pour notre leçon, il est important de noter que si l'on travaille son discours, choisit avec soin ses mots, ses supports pédagogiques, on laisse l'improvisation nous guider en ce qui concerne les gestes. Or, c'est un tort. Quoi de plus ennuyeux qu'un poteau télégraphique donnant une conférence ou a contrario un sémaphore discourir devant nous. De même la répétition de certains gestes peuvent lasser l'auditoire, le détourner d'une écoute attentive.
Il est donc important de repérer notre vocabulaire gestuel et vérifier si celui-ci n'est pas trop pauvre. Souvent on va chercher s'il ne comporte pas de parasites, c'est-à-dire des gestes sans significations, détournant l'attention de l'auditoire. Ces gestes que Cosnier nomme extra-communicatifs n'ont pas de fonction explicite dans la communication mais n'apparaissent pas au hasard bien sûr. On trouve parmi eux les gestes d'autocontact qui traduisent le plus souvent un besoin de recentrage, de réassurance (se gratter, se caresser, se tordre les mains, etc.) et qui peuvent témoigner du malaise de la personne.
Mais on a rarement l'ambition d'enrichir notre gestuelle. Seul, sans vidéo, l'entreprise est mal aisée il est vrai. Pourtant il suffit de prendre conscience dans sa vie courante de nos gestes car ce seront souvent les mêmes qui seront mobilisés lors d'une intervention orale. A partir de cette prise de conscience il est plus facile de s'interroger sur la pertinence de certaines mimiques ou de mouvements de mains.
Et pourquoi ne pas s'approprier des gestes que l'on a vu chez d'autres comme on le fait couramment avec les mots. Avec la même précaution évidemment, quel sens donner à celui-ci , quand l'utiliser, quelle ampleur lui accorder, comment le faire sien?
Ainsi on peut s'intéresser aux gestes phatiques destinés à attirer l'attention de l'aute, d'établir le contact, interpeller. Ils sont utiles en début de communication mais on ne doit pas les négliger en cours d'oral. Ils permettent de recadrer l'auditoire qui se disperse, de faire revenir les distraits, etc. La panoplie est riche. A vous de vous forger votre dictionnaire.

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